NOVEMBRE I 591.                               300
desquels j'eus si grand peur, qu'il me sembla avoir esté blessé d'eux, encores qu'il n'en fust rien.
En ce temps, mourust à Orleans nostre maistre Ilila-ret, cordelier, qui par ses séditieuses prédications se duisoit le peuple, et l'animoit au sang ct à la rebellion contre son Roy. À l'occasion dequoi les ligueus, ct principalement ceux du petit cordon (0, le faisoient un saint, et compagnon de saint Pol en paradis; et vinrent à telle impudence de dire que ce beau pere faisoit en paradis la Trinite seconde, avec les deux de Guise; le­quel blasphème a esté presché par lui publiquement dans Orleans : en detestation duquel, et de la farce d'un crucifix que ce beau pere jouoit en sa chaise, un cha* no i ne de Sain t-Agnan composa l'epitafe suivant eu forme de prosopopée, qui me donna.
Quc mc loués vous tant, confreres ct amis?
Pai vescu, je suis mort, ct suis au jugement,
Non de vous, mais de Dieu, qui juge justement
Pour me recompenser selon ce qu'ai commis.
Mon sçavoir, mes sermons, mes escrite et labeurs,
M'ont veritablement acquis en toute place
Du bon peuple chrestien la faveur et la grace :
Mais Dieu seul a congneu et mon cœur et mes mœurs.
De quoi me peult servir de dire en vos louanges
Que pour son compagnon saint Pol m'avoit choisi,
Et m'avoit fiait assoir sur veloux cramoisi,
En sa chaire prés Dieu, entre les plus saints anges ?
De quoi me servira de publier vos songes,
Qu'en dormant m'avez veu au ciel rempli d'honneurs ,
Par dessus les martyrs, vierges et confesseurs?
Tels propos si subtils sont erreurs et mensonges ;
Aussi bien que de dire, ès funebres oraisons,
Qu'en paradis je fais la Trinité seconde,
Avecque ces deux princes que pleure terre et Fonde :
C1) Ceux du petit cordon : confrérie du cordon de saint Françols. EUe agissoit de concert avec les Seize.
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